La peinture : outil de langage, vecteur d’expression ou comment le réel se manifeste au travers de l’imaginaire

La peinture : outil de langage, vecteur d’expression

Ou comment le réel se manifeste au travers de l’imaginaire, en lien avec le symbolique dans le cadre d’un atelier réalisé avec des enfants de 6 à 11 ans

« La sensibilité artistique et les capacités d’expression des élèves sont développées par les pratiques artistiques, mais également par des références culturelles liées à l’histoire des arts.
Ces activités s’accompagnent de l’usage d’un vocabulaire précis qui permet aux élèves d’exprimer leurs sensations, leurs émotions, leurs préférences et leurs goûts. Un premier contact avec des œuvres les conduit à observer, écouter, décrire et comparer. »

Cet énoncé n’est pas une citation d’un sociologue ou d’un philosophe, encore moins d’un psychanalyste, il s’agit d’un extrait du bulletin officiel (hors-série n°3) de l’Education Nationale publié le 19 juin 2008.

La parution de ce texte, a suscité en nous, une institutrice de Seine-Saint-Denis et moi-même, le désir de mettre en œuvre un atelier d’arts plastiques pour les élèves de sa classe de CP à Saint-Ouen.

Il s’agissait d’élaborer et d’animer un temps et un espace que nous souhaitions particuliers, basés sur l’observation, la parole, les associations libres et la pratique de différents médias (gouache, pastels, encre).

La conduite de cet atelier à partir de 2012 s’est faite à l’appui de ma pratique personnelle de la peinture depuis plus de 30 ans, terreau fertile de ma cure. Peinture et psychanalyse ont une donnée commune : l’image. La mise en œuvre de cet atelier témoigne du désir et de l’expérience.

Notre choix avec une puis deux des enseignantes de l’école primaire Jules Vallès de Saint-Ouen, fût de le faire vivre de manière bénévole, dans le temps de l’école, tout en le reliant ou l’intégrant aux disciplines scolaires (histoire, mathématiques, expression orale, géographie, etc.).

Les enfants de ces classes ont, pour la plupart, une pratique de la peinture ou du dessin assez limitée. Certains d’entre eux vivent dans des conditions extrêmement précaires. Le passage de l’école maternelle à l’école primaire conduit les enfants dans bien des cas, à rompre avec l’imaginaire pour se confronter à un enchaînement de règles et de normes aussi bien au niveau de l’enseignement qu’au niveau même des temps accordés à chaque discipline.

Notre pari au sein de cet atelier a été de maintenir un imaginaire fort, tant dans le cadre de l’expression verbale que picturale, repoussant ainsi les limites et bords institutionnels et travaillant sur ces marges et leur porosité.

Préambule et enjeux de l’atelier

Au fil des années, des enfants de cours préparatoire, de CE1 et de CM2 (6-11 ans) ont pu participer à cet atelier. Ces classes sont composées d’environ 25 élèves, à plus de 80% issus de l’immigration, principalement d’Afrique noire et sub-saharienne (Mali, Sénégal, Burkina) mais aussi du Maghreb, de Turquie, de Chine et d’Europe de l’Est.

L’atelier a lieu dans les locaux de l’école, pendant le temps scolaire à raison d’environ 3 heures continues une fois par mois. Le dispositif de l’atelier reste celui de la classe. On ne sort pas de ce cadre même si ma présence et le relatif effacement de l’institutrice modifient la donne et des ajustements
mobiliers et d’espaces sont nécessaires. Ce sont sans doute ces ajustements qui permettent malgré tout d’élaborer un nouveau cadre, singulier et propre à cette activité.

Je me présente aux enfants en début d’année comme peintre et non comme « psy » (afin de ne pas compliquer ni effrayer et ne pas prétendre à un travail psychothérapeutique quelconque). Le travail se fait en présence de l’institutrice, sans laquelle je ne parviendrais pas à faire respecter un minimum d’ordre et de calme.

Les enjeux de cet atelier sont de permettre aux enfants :

  • De pouvoir pratiquer des activités qu’ils n’ont pas ou peu l’occasion d’exercer par ailleurs ;
  • De disposer de quelques éléments de connaissances en histoire de l’art pictural ;
  • D’être sensibilisé aux images fixes, de pouvoir poser un regard ; eux qui vivent dans un univers d’images animées, de zapping et souvent d’instabilité (y compris géographique – changements de domiciles ou d’hôtels) ;
  • De parler et d’associer librement – oser dire sans contraintes ni risques de sanctions ;
  • D’avoir la possibilité de créer tout en respectant des règles et quelques consignes, en leur laissant une autonomie dans un cadre structurant (cadre minimal mais fondamental pour ancrer et enrichir la liberté d’expression tant verbale qu’artistique) ;
  • Enfin, de circonscrire leur place vis-à-vis des autres enfants, de l’institutrice et de moi même, dans un temps de parole et d’échanges. Chacun pouvant s’exprimer ouvertement en respectant les dires de l’autre.

Organisation de l’atelier (environ 3 heures réparties en 2 phases)

La phase de découverte et d’expression verbale (3/4 d’heure)

Dans un premier temps, sur la base d’un montage visuel de documents que j’ai préalablement établi (cf. diapos 1 : séances sur le portrait réalisées avec des enfant de 6-7 ans), je projette aux enfants des diapositives présentant un artiste, ayant généralement œuvré entre la première moitié du XIXè ou le XXè siècle (Malevitch, Picasso, Von Jawlensky, Matisse, Klee, Dubuffet, K. Appel, JM. Basquiat etc. – choix de peintres connus, davantage figuratifs qu’abstraits) ainsi qu’une ou deux œuvres de sa création.

J’ai choisi des œuvres que les enfants pourront identifier et associer à leur auteur. Le trait qui distingue le style de l’artiste nous permet de lire un effet de langage qui se projette sur un espace, la toile. Il s’agit là, de la manière de faire qui est propre à chaque artiste, celle donnée à voir dans une œuvre qui perdurera après lui. L’œuvre révèle et recouvre son créateur ; elle le dépasse avec les regardeurs in situ et à venir (cf. ce que disait Marcel Duchamp à propos du tableau : il est autant le fait de l’artiste que des regardeurs).

C’est l’occasion pour nous, les enfants et moi-même, d’échanger tant sur le peintre que sur l’œuvre présentée. Ce travail oral descriptif et expressif permet aux enfants de sortir d’un cadre purement scolaire, dans la mesure où l’institutrice n’intervient pas sauf pour éventuellement rétablir le calme ou mettre en lien mon travail avec celui qu’elle élabore avec eux en classe (en histoire de l’art, notamment) et je les assure qu’il n’y a pas, à priori, de bonne ou de mauvaise réponses, qu’ils peuvent dire, imaginer et associer comme ils l’entendent, librement et dans le respect de ce que chacun pourra apporter.

Cette première phase est un préalable au passage à la création picturale. Elle dure environ 3/4 d’heure. Je veille à ce que tous les élèves puissent s’exprimer librement, sollicitant ceux qui sont en retrait. Un dialogue parvient peu à peu à s’instaurer entre nous et je m’efforce de fédérer tous les élèves autour du projet.

Le lieu de la parole est différent de celui de la pratique de la peinture. Les échanges verbaux se font dans un espace de la classe où les élèves sont regroupés et assis par terre devant l’écran de projection ; l’expression picturale opérant au niveau des tables des élèves. Cette différence de niveau et d’espace, est bien vécue et comprise par les enfants, elle permet de scander la séance d’atelier, d’opérer une transition et de changer de position : passage d’un regard horizontal à un regard vertical mais aussi passage de la libération de la parole à la concentration sur les gestes et étapes de création.

Lors de ce premier temps, je leur rappelle, les fondamentaux sur les couleurs (couleurs primaires, secondaires et valeurs). A chaque séance, nous révisons de manière ludique ces principes (jeu de questions – réponses).
Les échanges et discussions autour des peintres et de leurs œuvres projetées permettent à chacun d’évoquer ce qu’il voit, perçoit, ressent C’est également un moment où certains d’entre eux laissent libre court à leur imaginaire. Des déplacements et condensations émergent de la parole des enfants. Le tableau capture par le regard celui qui le regarde et qui lui signifie quelque chose qui lui était jusqu’alors invisible ; le tableau peut devenir alors symptôme : symptôme du peintre et support du symptôme du regardeur.

Les impressions et les dires portent tant sur la forme (évocations de la géométrie et de l’espace), que sur les couleurs (primaires, secondaires, valeurs), que sur les émotions (ça me rappelle…), que sur le fond (que voit on ? qu’est ce qui est représenté ? qu’est ce que ça peut vouloir dire ? etc.) Les élèves s’expriment au travers d’évocations descriptives. Un signifiant énoncé par l’un,
entrainant l’évocation d’un autre par son voisin : l’énonciation d’un signifiant représentant le sujet pour un autre signifiant. Ainsi, le sujet court d’un signifiant à l’autre. Les mots et la parole permettent de dé-fixer l’image, alors que l’image présentée est du côté de la permanence.

Ils émettent des hypothèses et tentent de déchiffrer des formes et des symboles. L’imaginaire fait ses effets malgré parfois, un temps d’inhibition du fait du regard de l’autre mais aussi, parce que l’œuvre proposée atteint le jeune spectateur dans son intimité.

Ainsi, lors d’une séance, après avoir abordé un tableau d’Odilon Redon représentant un bateau sur la mer et évoquant le voyage et la pêche, une jeune fille de 7 ans venant du Sénégal s’est mise à pleurer en fin de matinée, évoquant l’absence de son père et le manque qu’elle ressentait – celui-ci, pécheur, est resté vivre au Sénégal.

Face à la projection des œuvres, peut apparaître un réel difficilement soutenable pour certains, indicibles souvenirs et effets signifiants manifestés par une béance (– phi) comme impossible à affronter. Ce réel est repris par l’imaginaire du tableau et le signifiant de l’objet : l’objet, défini de façon borroméenne à l’entrecroisement des trois ronds R-S et I, au point de serrage du nœud.

Mais ce que nous pouvons observer depuis bientôt 6 ans, c’est que, sauf pour quelques cas singuliers où des manifestations émotionnelles fortes se sont fait sentir (larmes, agacement, gestes d’agressivité), chacun a pu s’alléger d’un réel peut être parfois trop encombrant par l’expression d’une œuvre symbolique sans toutefois s’écarter d’un imaginaire propre.

Certains sont saisis par un élément du tableau qu’ils ne comprennent pas puis, avec mon accompagnement, ils parviendront à faire des hypothèses sur ce que le peintre a voulu signifier. Le détail d’une œuvre constitue une énigme à résoudre. Il a effet de signifiant et de ponctuation dans le tableau. Le détail, au départ, in-signifiant, voire inutile pour la trame du récit de l’œuvre parviendra à viser quelque chose au delà du texte, de la lettre et c’est en ce sens que l’œuvre produira chez l’observateur (ici, chez l’enfant), un effet de Réel.

C’est Freud le premier qui a souligné l’importance du détail, des restes, des résidus des manifestations de l’inconscient dans la vie quotidienne, tels que le lapsus, les rêves, les actes manqués ; il en a fait la matière première, précieuse, d’un des ses textes princeps, Psychopathologie de la vie quotidienne 1.

De reste inutile destiné à l’oubli, ce matériel dit insignifiant retient au contraire tout l’intérêt de l’écoute d’un psychanalyste. Il apprend même à l’analysant à voir que ce reste n’est pas sans importance. Parfois, même ce reste, cette pièce détachée qui se laisse isoler comme une lettre, vient après coup réordonner la jouissance d’un sujet, l’économie libidinale selon Freud.

J’explique, que c’est parfois, un détail, à priori insigne, qui marque la subjectivité de l’auteur (cf. les cercles ou tâches de Bacon, les objets anthropomorphes d’Yves Tanguy, les symboles de Paul Klee, les croix de Tapiès ou encore, l’index de Saint Jean-Baptiste de L. de Vinci), permet son identification mais aussi donne une toute autre dimension à l’œuvre, à la manière de l’interprétation analytique qui tombe toujours sur le détail et non sur le tout. Freud écrivait dans l’interprétation du rêve 2 que « si l’attention est qualifiée de flottante, c’est pour que le détail insignifiant remonte à la surface ».

Ce détail qui a souvent la forme d’une lettre, change la surface, la dimension de l’œuvre.

Le dé-tail(le) suscite l’interrogation, les supputations, hypothèses et donne place à l’imaginaire du spectateur de l’œuvre mais aussi, parfois à la gêne, au mi dire et au silence. Le détail coupe, taille l’énoncé du récit pictural. Il peut aussi avoir fonction de ponctuation dans la lecture de l’œuvre. La coupure a effet de réel chez l’observateur, de vérité.

J. Lacan dans Le désir et son interprétation 3 énonçait « L’œuvre d’art […] introduit dans sa structure même, ce fait de l’avènement de la coupure pour autant que s’y manifeste le réel du sujet, en tant qu’au delà de ce qu’il dit, il est le sujet de l’inconscient ».

L’art a pour but de représenter un réel non représentable d’un objet qui échappe, qui manque. A la place du vide, de la béance laissée par ce manque dans l’œuvre, vient paraître l’objet imaginaire du fantasme. Entre ce qui se présente et ce qui reste à représenter, l’artiste (mais aussi les regardants, l’autre) signale ce qui fait jouir de l’œuvre.

Quelques observations faites à l’issue du premier temps de l’atelier

Le tableau présenté aux enfants est lu par certains, imaginé par beaucoup, des signes et signifiants sont décryptés ou bien s’imposent aux sujets. Les spéculations autour des éléments de détail et de symboles de l’œuvre sont parfois débordantes.
Pour certains autres, on a affaire à de l’indicible ; un silence, une inhibition font entrave à toute parole.

Les effets de groupe émergent rapidement, certains occupent l’espace et le temps, d’autres restent en retrait, quelques uns répètent inlassablement ce qui a déjà été dit par des camarades, d’autres sont pris par des pensées et des signifiants qui interfèrent.

Les échanges et paroles des enfants autour de l’œuvre permettent à ces derniers de mieux prendre en compte ses éléments constitutifs : les formes, les couleurs et les plans. De s’imprégner également de l’œuvre ainsi proposée. C’est sur la base de cette imprégnation et de cette observation attentive, quasiment analytique que le travail pictural de l’atelier pourra prendre sa place.

La phase d’expression artistique (1 heure 45)

La seconde étape de la séance porte alors sur la réalisation du travail plastique à proprement parler, là aussi, selon un dispositif conciliant cadre et liberté, afin d’en dégager, en confiance, le meilleur de chacun.

J’ai choisi, malgré certaines réticences de l’Education Nationale, de travailler « à la manière de… », en se gardant toutefois de recopier. J’ai invité les enfants à procéder à la manière de l’artiste étudié afin de s’engager sur une base rassurante, tout en conservant une part de liberté et de subjectivité, d’imaginaire aussi.

Ce que réalise l’enfant reste de l’ordre de la sphère imaginaire, le dessin exprime ce que l’enfant a pu dire et écouter dans le temps d’échanges oraux, il visera autant à représenter qu’à signifier. Dans ce sens, il permet parfois l’expression d’une vie intérieure.

Au début de la matinée, nous avons, l’institutrice et moi-même, mis en place les tables, préparé les supports et disposé les palettes assorties de couleurs. Avant tout démarrage du travail pictural, des informations et consignes préalables sont nécessaires.

J’ai procédé, avant la rencontre, à la réalisation de schémas et rédigé à la main quelques notes structurant les différentes étapes de réalisation de l’œuvre étudiée. Les plans et les éléments du tableau sont analysés et les temps de mise en œuvre sont numérotés (cf. schéma diapo 2).

Sur le tableau noir, je trace le contour de la feuille et positionne, au fur et à mesure de la séance, les éléments essentiels de l’œuvre de référence. C’est le moment de rappeler que le dessin doit occuper tout l’espace du support (en effet car si l’on prend en compte l’importance du support, on réalise que le dessin d’enfant possède une fonction peut être sous-estimée, celle de situer le sujet dans l’espace), énoncer les formes géométriques essentielles, les couleurs à mettre en place, le respect des proportions et de reprendre certains des signifiants des enfants qui ont été énoncés lors de la première partie de l’atelier (cf. croquis diapo 3).

L’évocation de certains signifiants (ballon pour soleil, mangé par des souris pour signifier la déformation d’un corps etc.) prononcés par les enfants lors de la première partie permet de faire écho à ce qui s’est dit, provoquant un effet transférentiel de leur part à mon endroit (rires, interpellations, clins d’œil de connivence etc.). A l’inverse, je n’ai jamais ressenti d’animosité ou de peur, parfois de la timidité ou du silence mais jamais de transfert négatif.

Puis vient le temps de la réalisation. Avant de peindre, les enfants dessinent au crayon, étape par étape, les principaux éléments de l’œuvre du peintre étudié. J’ai pris le parti de ne pas les laisser entièrement libres de faire, mais de les encadrer par quelques consignes de traits, de couleurs, de mise en œuvre dans l’espace de la feuille. Ce n’est qu’après avoir élaboré les principaux éléments mis en œuvre,
que le travail de peinture peut être réellement engagé. Les médias utilisés sont la gouache, le crayon, les pastels.

L’institutrice et moi-même, circulons entre les tables pour aider les enfants, les conseiller, leur montrer, rectifier, parfois et aussi, les encourager. Je m’assure que tous les enfants ont bien compris la consigne et je n’hésite pas à leur consacrer individuellement du temps pour leur transmettre des explications complémentaires. Si certains élèves en difficultés utilisent des procédures d’évitement lors d’un travail scolaire normé, dans ce lieu, ces mêmes sujets se lancent spontanément dans le processus créatif et manifestent le désir de faire.

En cours de séance, jamais je ne me hasarde à une interprétation devant les enfants. Le travail est mené avec des outils de la psychanalyse (signifiants, associations libres, parole en écho à ce qu’ils me disent, effets transférentiels etc.) mais sans interprétation. D. W. Winnicott écrivait dans Jeu et réalité : « Le moment clef est celui où l’enfant se surprend lui-même et non celui où je fais de brillantes interprétations. » 4

Si des « erreurs » sont commises comme des tâches, des coulures, de l’eau renversée, elles sont traitées comme des accidents qui peuvent donner un sens autre à la création. On travaille sur la tâche, on lui donne une place, une fonction dans le tableau, on la récupère pour lui donner cette force du détail qui sera la marque subjective de son auteur. Ces fautes de frappe sont la manifestation d’un Réel. A ce sujet, Lacan, dans Le désir et son interprétation disait : « La question se pose […] de savoir si dans l’œuvre d’art , ce que l’on peut appeler faute de
frappe va devenir pour nous significative.[…] Car il est clair que dans l’œuvre d’art, ce que l’on peut appeler la faute de frappe […] qui se présente à nous comme une discontinuité, peut nous amener à quelque connaissance utile pour nous servir d’indice où nous trouvons dans les éclairages majeurs, dans leur portée inconsciente, tel ou tel incident de la vie passée de (son) auteur. » 5

Le psychiatre et analyste Daniel Widlöcher préfère parler de lapsus, les dessins se modifiant au fur et à mesure de leur exécution ; quand se produit une erreur, il y a correction, utilisation, exploitation, changement d’interprétation, complétée par l’ajout de nouveaux détails.

Le travail d’atelier de création à proprement parler dure environ 1 heure 45. Au terme de chaque séance, les élèves ont le temps de réaliser leur travail dans les délais impartis, à la différence de la plupart des exercices scolaires dixit les institutrices.

Au terme de la réalisation, les créations produites sont partagées par tous et affichées sans distinction dans la classe ou sur les murs du couloir la jouxtant. (cf. croquis diapo 3).

Les dessins sont adressés à l’adulte mais surtout à l’enfant lui-même, puis à ses parents. L’adresse est multiple. Adressé à moi, dans un premier temps, le message est en définitive retourné à l’enfant lui-même. Mais la peinture ainsi réalisée est aussi une invite à un échange avec moi.

Dans l’après coup de l’atelier, je tape sur l’ordinateur quelques notes sur ce que j’ai pu observer durant la séance, des schémas venant parfois illustrer les propos de l’écrit. Les impressions viennent de manière fluide et continue, en parallèle avec le cheminement de ma pensée. En réponse à la séance, de nouveaux dessins accompagnent mes notes. La symbolique des schémas et autres figures jalonnent tout le processus de fabrication de cet atelier : avant, pendant et après.

Généralement, à raison de deux fois l’année, une sortie dans un des grands musées d’art parisien (Picasso, Orsay, Beaubourg etc.) est organisée par une institutrice au profit des élèves et de quelques parents volontaires. Les enfants y retrouvent alors les originaux de certains tableaux étudiés.

En fin d’année scolaire, les travaux des élèves font l’objet d’une exposition à laquelle sont conviés les parents ainsi que différents partenaires de l’éducation nationale et de la Commune. Ce temps est proposé non seulement pour que les parents viennent apprécier le travail des enfants mais également pour qu’ils puissent, par ce truchement, franchir le seuil de l’établissement scolaire avec lequel ils sont parfois très mal à l’aise. Certains auraient dit qu’être confrontés à la peinture les mettait face à leur ignorance (ou leur enfance) et provoquait un malaise vis-à-vis de leurs propres enfants. D’autres, partagent avec nous mêmes, leurs émotions et ressentis au vu des œuvres exposées.

Malheureusement, force est de constater que les parents sont peu nombreux à venir, car l’école comme le tableau de l’enfant ont des effets symptomatiques pour les parents.

Le tableau capture par le regard celui qui le regarde et qui lui signifie quelque chose qui lui était jusqu’alors invisible. L’art – et la peinture tout particulièrement – s’empare des effets des images dans ses créations pour atteindre le spectateur dans son intimité ; la psychanalyse, quant à elle, cherche à les éclairer. Dans les deux cas, l’une allant vers l’autre, et réciproquement, elles se croisent au sein de que l’on pourrait nommer une ouverture à l’autre et donc, la nécessité d’en prendre de la graine.

Observations générales

Importance de la nature inquiétante et lugubre des impressions ressenties (inquiétante étrangeté).

Conclusion

Les principaux éléments d’observation que nous pouvons mettre en exergue sont les suivants :

  • Un transfert manifeste des enfants sur l’intervenant est engagé au bout de deux ou trois séances avec la plupart d’entre eux, sans distinction de sexe. Cette rencontre est un moment attendu par la plupart des enfants : manifestations de joie à mon arrivée, certains m’embrassent, d’autres me prennent la main, quelques uns me demandent de venir chez eux pour peindre, etc. Un transfert probablement accentué par le fait que l’intégralité du personnel enseignant est féminin. Mais la nature matérielle du dessin, la feuille de papier couverte de tracés et de couleurs, joue elle aussi un rôle dans le transfert. Certains enfants demandant à remporter le dessin chez eux ;
  • Les deux phases (expression orale, d’une part et pratique picturale, d’autre part) qui constituent cet atelier semblent bien équilibrées et permettent, en premier lieu, aux enfants de s’exprimer librement au fil des rencontres et de s’approprier davantage l’œuvre présentée ;
  • Les effets de groupe traditionnellement observés n’échappent pas à la règle (prise de position de leaders, mutisme pour certains, émotions submergeant quelques uns, répétition de ce qui a été préalablement dit par les leaders, instabilité parfois, honte de dire, absences, chahuts ponctuels etc.) ;
  • Certains élèves, scolairement en situation très difficile (peu ou pas d’accès à l’écriture, à la lecture ou au calcul), parviennent à respecter les contraintes et présenter un travail élaboré, soigné et émotionnellement fort (enthousiasme, excitation, larmes) ;
  • Les élèves les plus brillants au niveau scolaire (écriture, lecture et calcul maîtrisés) sont en proie à de grandes difficultés dès lors que les consignes ne sont pas suffisamment élaborées ou encadrantes ;
  • Des élèves parviennent parfois à « exporter » la peinture et leur connaissance de fragments d’histoire de l’art dans leur foyer. Parfois, certains viennent en classe avec un livre d’art ou des représentations d’œuvres d’artistes abordés en séance. D’autres, de manière singulière, parviennent à mobiliser leurs parents pour entrer dans Paris et accéder à un Musée ; le côté sacralisé du Musée ainsi que le périphérique faisant barrière entre la Capitale et la banlieue sont les principales entraves à leur venue à Paris, parfois même, davantage que le droit d’accès au Musée ;
  • Le travail d’une séance avec le groupe me permet parfois de réajuster celui de la séance suivante en réorientant le choix de l’artiste et de l’œuvre. La façon dont l’enfant s’approprie une œuvre, débordant du cadre proposé ouvre la perspective vers un travail autre, souvent, plus expressionniste (cf. passage de Picasso à Van Gogh) ;
  • Bien souvent, l’atelier se déroule avec beaucoup de joie et de bonne humeur. Chacun œuvre avec un réel investissement personnel. Parfois, une émulation du groupe se fait sentir : échanges entre les enfants, critiques, intervention de quelques uns pour en aider d’autres ;
  • Lorsque des moments d’inhibitions apparaissent ou lors de confrontations à des traces de refoulés, quelques-uns sont submergés par des vagues d’émotions allant jusqu’aux larmes, marquant ici un indicible Réel. Un temps d’arrêt est nécessaire pour la compréhension de ce qui les traverse, puis, le travail reprend peu à peu, jusqu’à un terme. Car l’enfant amènera toujours ce travail artistique à son terme. La peinture apparaît parfois, plus apte que les mots, à nous mettre en contact avec l’indicible ;
  • Le travail pictural organisé spatialement réalise une coupure, il parvient à produire une surface projective. Il donne à l’imaginaire du sujet un cadre topologique, il réalise la coupure entre le sujet et l’objet a cause du désir ;
  • Jamais en 6 ans, un enfant n’a renoncé et abandonné la réalisation du travail. Parfois, l’exercice est réalisé de manière expéditive mais les découragements n’ont pas conduit à des abandons. Les élèves en grande difficulté d’apprentissage scolaire élaborent un travail abouti et jamais ne rendent feuille blanche comme ils peuvent le faire parfois, à l’occasion d’exercices « scolaires » ;
  • Les bons élèves scolairement parlant se sentent parfois déstabilisés, angoissés car ils n’arrivent pas à se rendre compte s’ils « ont bien fait ou pas ». Ceci générant des interrogations fréquentes : « C’est bien ? c’est comme ça ? » Ceci révèle une forme d’angoisse du fait de la perte des repères traditionnels et donc du modèle que le cadre scolaire leur a déjà inculqués mais aussi une très grande difficulté à se raccrocher à l’imaginaire, comme si un savoir qui existe leur avait échappé en entrant dans les apprentissages ;
  • Inversement, certains élèves en difficultés répondent parfaitement à la consigne et constatent qu’ils sont capables de faire et d’obtenir des encouragements. L’épreuve ainsi effectuée participe d’une réaffirmation moïque voire même d’une certaine rephallicisation du sujet. Le temps de cette séance, ils ont su prendre leur place au sein de la classe. Les plus jeunes élèves (6-7 ans) et les moins avancés scolairement sont restés plus proches de leur imaginaire, moins formatés et plus libres dès lors qu’on leur donnait quelques repères et les encourageait. Cet âge correspondant à la période de refoulement de la petite enfance ;
  • Pour certains d’entre eux, des gestes simples comme le tracé d’une ligne d’horizon ou
  • un cercle est une épreuve, et l’acte répété non satisfaisant engendre un découragement : « Je n’y arrive pas. J’essaie mais ça ne veut pas marcher, je ne peux pas faire autrement ». La répétition de l’acte qui ne correspond pas à l’intention est ici aussi la marque d’un Réel symptomatique. Bien souvent les blocages sont liés à une incapacité de représentation du « dessus-dessous » (cf. représentation du nouage borroméen), l’enfant étant dans le champ métonymique plutôt que métaphorique (tout est lié du fait de l’angoisse du vide, de la coupure et du passage au dessus dessous) (cf. croquis diapo 4) ;
  • Le travail consacré à cet atelier mensuel est le seul qui ait permis de canaliser l’attention et l’intérêt des enfants sur une période aussi longue (3 heures fractionnées en deux alors même que le temps alloué à la plupart des disciplines est fixé à 20 minutes) ;
  • En rappelant qu’il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises réponses mais que c’est la mise en perspective des questions qui est importante, certains élèves en difficultés s’expriment plus facilement qu’à l’accoutumée car ils se sentent en confiance. Ils s’autorisent à prendre la parole car il n’y a pas de jugements de valeur ;
  • Émettre des hypothèses est une pratique importante du fait de l’absence de bonnes ou de mauvaises réponses. Changer le regard des autres à l’écoute de ce qui est dit même si ça paraît étrange est une des règles énoncées, tout comme le respect de la parole de l’autre et l’attention apportée à cette prise de parole ;
  • Amener l’enfant, qui baigne dans un environnement saturé de virtuel et d’images animées, à regarder les images autrement : tendre à supprimer le « zapping » et la position d’objet dans lequel ils sont mis, au profit d’un temps long d’observation et de parole les positionnant davantage de manière subjective ;
  • Certains élèves ont développé au travers de l’expression orale et d’associations libres, un sens de l’observation et une capacité à énoncer un récit imaginaire. Cette libération de la parole pour certains d’entre eux s’est vue transposée à d’autres domaines comme le commentaire de textes, la lecture et l’interprétation de poèmes ou encore le commentaire de photographies, cartes et autres images. Les effets de cette pratique rencontrent des échos chez les élèves les plus en difficultés avec les enseignements scolaires dirigés traditionnels, permettant, d’une certaine manière de réduire des écarts avec ceux qui sont mieux inscrits dans la lecture, l’écriture ou le calcul ;
  • Les élèves retiennent et assimilent globalement bien les œuvres en lien avec les artistes (une des élèves a eu une discussion avec sa sœur, de six ans son aînée, au sujet d’une œuvre abordée en classe, se positionnant en « sachant »). L’une des institutrices a, dans un après coup du premier atelier réalisé en 2012, créé avec les enfants un « musée imaginaire » où des œuvres sont affichées, discutées, expliquées, commentées et ce, à raison de plusieurs fois par semaine. Plus de trente tableaux, artistes et différents courants picturaux sont ainsi proposés. Un des objectifs à cette activité a été de prendre la peinture, comme fil directeur des enseignements. La peinture pour écrire, compter, approcher l’histoire et la géographie ;
  • Incidence sur les autres apprentissages : vocabulaire élargi avec un champ lexical propre à la peinture ; utilisation de la peinture pour appréhender des notions géométriques, meilleure appréhension du passé et du présent, de la géographie, de la chronologie (frise historique en lien avec la peinture et les arts : de la préhistoire, au XXI ème siècle). Tout au long de l’année l’espace temps et la chronologie sont nourri par les apprentissages via la peinture. Développement de l’imaginaire au travers de fragments / détails de peintures : « Racontez-moi une histoire ». Parfois, l’enfant parvient à voir et à donner des interprétations que l’institutrice n’avait pas envisagées ;
  • L’atelier a permis de fédérer un projet d’enseignement sur toute une année au départ, et depuis, maintenant 6 ans. Ce projet d’enseignement n’est pas non plus sans effet sur les échanges entre l’école et les familles, les enfants étant un vecteur de transmission d’un savoir depuis l’école vers le foyer. L’art et la peinture en particulier sont parvenus à s’infiltrer dans des familles pour lesquelles, la culture est généralement très éloignée des représentations picturales occidentales ;
  • Les enfants acquièrent un savoir que les parents n’ont pas. Introduction de la peinture dans la famille et acquisition d’un sens de l’observation ou de l’attention avec la peinture qu’ils peuvent voir dans le métro, sur des affiches. Les enfants marquent une fierté à « éduquer » leurs parents (dixit un père). L’histoire de l’art devient palpable pour quelques parents qui acceptent d’engager une démarche vers les musées avec leurs enfants, bien que rétifs au départ : musées de Claude Monet à Giverny, d’Orsay, Albert Kahn. Quelques parents portent sur leurs enfants un autre regard. Les enfants apportent un savoir à des parents apprenants ;
  • A l’occasion de visites au musée, ils savent observer, commenter, mettre en relation, analyser. Lors d’une visite au musée d’Orsay, les enfants ont fait des commentaires à propos qui ont mis la conférencière en difficulté. Celle-ci a réagi avec violence vis à vis des enfants, comme si ces derniers la fragilisaient. Elle les a brimés et les a interrompus pour éviter de se sentir débordée. Certains enfants s’en sont plaints et ont dit qu’ils voulaient la frapper, manifestant à leur tour d’un désir de violence, ici physique. Dans l’après-coup, ils ont su expliquer pourquoi la conférencière avait agi ainsi. L’institutrice a alors décidé d’écrire au Musée en expliquant la situation après en avoir discuté avec les élèves. Le Musée a pris en considération ses doléances et des médiateurs d’Orsay sont venus à l’école pour voir le travail effectué. Ils ont invité les enfants et leurs parents à venir gratuitement au musée en mettant une conférencière à leur disposition.
  • L’atelier permet aux enfants de manier, croiser, voire tisser au sein de l’école, des fils d’imaginaire, de symbolique et de réel :
    • L’imaginaire comme projection de ce que l’on va faire.
    • Le symbolique qui se révèle à chaque fois que l’on fait de la différence dans le travail réalisé (marquant la subjectivité de l’enfant).
    • Le Réel comme forme alors réalisée mais aussi comme trou, faille, faute defrappe, discontinuité, impossible.
  • Ce nouage est peut-être à l’origine de la pérennité de l’atelier. Pérennité au cours d’une même séance, pérennité des séances tout au long de l’année et pérennité de l’atelier dans le temps ;
  • On passe de l’objet oral (l’écran, le support) à l’objet anal (les traces sur ce support), ensuite le dessin prend valeur phallique quand il se révèle si précieux que l’enfant ne veut s’en séparer et qu’il le considère comme sien et soi. En outre, le dessin d’enfant se situe dans le champ du visible, donc de la pulsion scopique, il est sous le regard, il est donné à voir. Il dépasse donc le niveau pulsionnel, il est support de l’objet a.

L’art est un objet de psychanalyse mais aussi un symptôme. Il dispose probablement également d’effets thérapeutiques.

La psychanalyse partage avec l’art l’ambition de transformer la jouissance. Tandis que l’art chiffre, la psychanalyse déchiffre la jouissance.

La psychanalyse n’a pas seulement affaire aux pulsions et aux affects refoulés, elle est aussi concernée par la sensibilité. Ainsi, Freud ne limite pas l’esthétique à la « théorie du beau » mais la définit aussi comme « la théorie des qualités de notre sensibilité » 6.

Lacan ne dit pas autre chose quand il enseigne à ses élèves que l’esthétique « c’est ce que vous sentez », en précisant qu’elle n’est pas transcendantale, au sens de l’esthétique kantienne. Il la réfère plutôt au corps, mais pas à n’importe lequel. Appartenant à la dimension de l’Imaginaire, ce corps est aussi lié au Symbolique et au Réel 7.

Le Réel c’est l’impossible, impossible à imaginer, impossible à symboliser, à attraper avec le signifiant, le langage, tel que :

  • Impossible à acquérir et utiliser au regard d’un savoir constitué ;
  • Impossible à inscrire dans la lecture et l’écriture. Mais une autre écriture portée par des mots exprimés face à une image fixe, presque dérisoire au regard de ce que l’enfant peut percevoir dans un quotidien en permanente agitation et mouvement, est essayée dans ces ateliers ;
  • Impossible à dire. Mais qui peut se traduire par le trait, la trace, les couleurs ;
  • Impossible à verbaliser face à une œuvre qui fait fonction de miroir ;
  • Impossible à effectuer même par le trait ou les couleurs (absence de métaphorisation) ;
  • Impossible à mener à bien par l’effet d’accidents et aléas et cependant prenant formes particulières (tâches, souillures etc. – cf. la « faute de frappe » évoquée ci-avant).

Pablo Picasso énonçait en 1923 : « L’art est un mensonge qui permet de dévoiler la vérité » et plus tard, en 1969, le peintre Bram Van Velde formulait : « Peindre, c’est toucher le vrai. Tout ce que j’ai peint est la mise à jour de quelque chose de vrai. Et par là, inépuisable ».

Lacan, en 1974, dès les premiers entretiens qu’avait mené Benoit Jacquot dans son documentaire intitulé « la psychanalyse » s’exprimait ainsi au sujet de la vérité : « Je dis toujours la vérité, pas toute. Car la dire toute, on n’y arrive pas. La dire toute, c’est impossible matériellement. Ce sont les mots qui y manquent. C’est par cet “impossible” que la “vérité” touche au “réel”. » 8

Les effets de Réel qui se manifestent, au travers de l’imaginaire et en lien avec le symbolique, lors de ces ateliers de peinture ne sont-ils pas également l’expression d’un nouage entre art et vérité ?

  1. Sigmund Freud – Zur Psychopathologie des Alltagslebens –Berlin, Karger – 1901 ↩︎
  2. Sigmund Freud – Traumdeutung – Vienne, F. Deuticke – 1900 ↩︎
  3. Jacques Lacan – Le désir et son interprétation – Livre VI – Editions de la Martinière – 1958-1959 ↩︎
  4. D. W. Winnicott, Jeu et réalité, Paris, Gallimard, 1971, p. 72. ↩︎
  5. Jacques Lacan, Le désir et son interprétation – Livre VI – Paris – Editions de la Martinière – 1958-1959 ↩︎
  6. Sigmund Freud, « L’Inquiétante étrangeté », Paris, 1985, Gallimard, p. 213 ↩︎
  7. Jacques Lacan, « R.S.I. », Séminaire inédit 1974-1975, Leçon du 18 mars, Paris, Editions de la Martinière, 1975 ↩︎
  8. La psychanalyse – Documentaire de Benoit Jacquot – Archives INA – 1974 ↩︎
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